mercredi 6 février 2008

L'abîme incommensurable de la misère...

L'on dit souvent que l'argent attire l'argent, ou encore que la chance attire la chance. Dans cette même ligne de pensée, l'on peut trouver en librairie une tonne de livres semblables à The Secret, un concept américain qui assure à son lecteur que s'il "attire vers lui" ce qu'il veut dans son esprit, il l'obtiendra dans un délai relatif à son désir de l'obtenir. Or le contraire est-il aussi possible? Une personne née dans un milieu difficile, que ce soit au niveau relationnel, économique ou environnemental (ici environnemental dans le sens d'entourage, et non de protection de la planète) est-elle condamnée à son sort? En d'autres mots, la misère attire-t-elle la misère? Ayant malencontreusement oublié mon Ipod (tous, oui tous condamnés à la société de consommation) chez moi, je n'ai pas eu le choix d'écouter aujourd'hui la conversation qui animait mes comparses dans l'autobus. D'un bref coup d'oeil, d'un coup d'oeil que je qualifierais d'écoeuramment supérieur, je les ai déjà analysés lorsqu'ils se sont assis: l'un porte les même pantalons qu'hier, et qu'avant-hier; d'un affreux bleu criard orné de marques que '50 cent a porté lors de son dernier clip, et qu'une pétasse refaite a zigner avant d'aller se faire vomir pour rester aussi affreusement mince. L'autre, de couleur noir, a le dessus de la tête blanc, puisqu'il a plus de pellicules que de cheveux. Le dernier, enfin, prend deux bancs: l'un pour lui, l'autre pour ses jambes écartées et a les ongles si sales qu'ils en paraissent tâchés. D'ailleurs celui-ci s'amuse à frapper violemment (si bien que j'en tressaille de fureur) une fille, qui, entre deux hurlements, joue à l'agace et se refait frapper, puisque c'est, j'imagine, pour elle, une façon de recevoir l'attention dont elle manque cruellement. À travers les menaces qu'ils se lancent continuellement, j'écoute et apprend qu'ils vont dans une école qu'ils qualifient "pour vagabonds", et qu'ils projettent de ne pas se rendre à l'école le lendemain pour aller fumer des sales bats, ce qui me confirme que la mainmise parentale n'est pas très élevée, voir nulle.
Si l'on en lit ce que le MSSS (Ministère de la Santé et des Services Sociaux) nous dit, "L'enfance et la jeunesse sont des étapes déterminantes du développement de l'être humain. Notre société permet à la majorité des enfants et des jeunes de grandir dans un contexte favorable, de s'intégrer normalement et de trouver une réponse à leurs besoins. La majorité de ceux-ci trouvent auprès de leurs parents, de leur famille et de leurs milieux de vie les ressources nécessaires pour assurer leur santé, leur sécurité, leur bien-être ou leur développement." Dans ce cas-ci, puisque les parents (donc la famille) ne semblent pas être très présents au niveau éducationnel, et que le milieu de vie est sous constante tension entre les différents individus: qui assurera leur santé, leur sécurité, leur bien-être et leur développement? Le MSSS parle de mise sur pied de plus de 14 programmes spécifiques aux problèmes vécus par quelqu'un qui naît dans la misère, et de quelques 6 sites adressés directement aux jeunes pour aider à leur cheminement. Ces mesures sont toutefois sur une base volontaire: un jeune qui naît dans la misère, qui vit quotidiennement sous tension n'ira pas par lui-même vers ces services. Que faire alors pour les aider? Il est facile de dire que cela passe par la force morale pour un enfant de famille aisée, toutefois quand celle-ci est employée à combattre les murs qui vous entourent, il n'en reste plus pour se sortir de l'abîme que semble être ce cercle vicieux des conditions humaines. Des 100 000 jeunes aidés par le MSSS chaque année, combien en sortiront transformés, et combien resteront aux yeux des mondains, des déchets de la société?
Ils ne sont que le résultat de ce que la Société elle-même aura bien voulu faire d'eux. À ce stade, il faut agir à cas par cas, en tentant d'en aider le plus possible.

Des 100% de parents miséreux, resteront 31% des enfants qui s'en sortent (soit qui ne répèteront pas les mêmes erreurs que leurs parents). Autant dire que ces "déchets" seront pour moi les plus beaux déchets du monde, et le gage d'une réussite personnelle sans équivoque...


Note: Les personnages présentés dans cet article sont tirés de faits réels. Toutefois leur situation familiale m'est inconnue, et mon jugement par-rapport à leur condition est tout à fait subjectif. Aussi si je me suis porté nez en l'air par cet article, prière de m'en excuser, ces personnages n'étaient là que pour illustrer une catégorie de population dont la situation m'était douloureuse.


¹Source (image): Association des centres jeunesse du Québec, http://www.acjq.qc.ca/
²Source: Ministère de la Santé et des Services Sociaux, http://www.msss.gouv.qc.ca/sujets/prob_sociaux

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